Transmission culinaire

14 février 2015 5 commentaires Par Ghislaine

Avec qui apprend-on à faire la cuisine ? Comment ? Qu’est-ce qu’on apprend ? Et une fois qu’on a appris, à qui transmet-on ce savoir ? C’est pour répondre à ces questions que L’Observatoire des Cuisines Populaire, ou OCPop pour les intimes, a confié à l’Ifop une enquête pour mieux comprendre l’apprentissage de la cuisine, et de quelle manière se perpétuent et se diffusent les pratiques culinaires en France. Et voici les résultats.

La cuisine a la côte chez les Français

Les Français adorent cuisiner, et plus ils sont jeunes et plus ils aiment ça. La convivialité, le plaisir sont les raisons données en premier, et la cuisine évoque les plats traditionnels, qu’ils soient français (bourguignon, blanquette…) mais aussi d’autres origines, comme le couscous ou le tajine.

Les Français les plus âgés déclarent un peu moins aimer faire la cuisine que les jeunes, peut-être parce qu’elle devient une obligation quotidienne. Si les hommes et les jeunes aiment faire la cuisine, ce sont toujours (sans surprise) les femmes qui la font au quotidien.

Identité, valeurs, la cuisine transmet plus que des savoirs

La manière dont on fait la cuisine fait parti de notre identité, analyse Thibault de Saint Pol, et cette valeur identitaire et affective se retrouve dans la transmission : « A l’origine, une personne sur deux a appris à cuisiner avec quelqu’un. Sans surprise, cette personne est majoritairement la mère, mais le rôle de la grand-mère et du père est loin d’être négligeable, comme celui du conjoint et des amis ensuite ».

Ce qui est transmis, estime Thibaut de Saint Pol, ce sont autant des valeurs et des représentations que des savoir-faire techniques. Les pratiques culinaires sont intimement imbriquées dans les modes de vie et les représentations de la cuisine rejoignent, au-delà de leur contenu culturel, l’univers plus large des représentations de l’alimentation.

La mère joue un rôle central dans cette transmission, mais les pères (surtout les jeunes) commencent à prendre leur place. Là où la mère va enseigner les gestes et les techniques de base, le père aura une approche plus qualitative et culturelle de la cuisine. Les deux pôles de la transmission pour les hommes sont l’indépendance (il faut bien pouvoir se débrouiller tout seul :)) et le partage.

Une pratique très marquée par la culture française

L’imaginaire gustatif a une grande importance dans la cuisine française, les raisons « nutritionnelles » apparaissent plus tard, notamment lorsque les enfants arrivent. Les indications nutritionnelles apparaissent plus tard dans la transmission culinaire française qu’aux Etats-Unis par exemple : pour nous, c’est avant tout du plaisir et du temps passé ensemble. Une anecdote amusante de Thibault de Saint Pol : « manger un sandwich, en France, ce n’est pas manger ».

Autre particularité de nos repas, l’aspect collectif : en France, celui qui ne mange pas comme les autres est regardé de travers. En Allemagne par exemple, les végétariens sont très bien acceptés et la plupart des restaurants offrent plus qu’un plat pour eux… Mais c’est vrai, et on peut le regretter, que le végétal a une image moins plaisir que l’animal dans notre cuisine…

Michel Bras : quand la transmission se fait dans les étoiles

Vous ne connaissez peut-être pas Michel Bras (prononcer « Brasse », il vient du Cantal). Ce cuisinier, et pas chef comme il aime à le rappeler, a appris la cuisine avec sa mère et sa grand-mère, et a transmis son savoir à son fils Sébastien qui tient aujourd’hui le fameux restaurant sur les hauteurs de Laguiole.

Il a commencé le topo en nous parlant de la tomate farcie : pas une boule de viande dans une tomate creuse, mais un mélange délicat d’herbes, de mie de pain et de reste de viande qui cuisent rapidement, laissant la tomate encre un peu ferme et s’imprégnant de son jus. Pour moi qui n’ai jamais aimé la tomate farcie, j’ai entrevue le bonheur qu’on doit avoir de se retrouver à sa table.

Pour Bras, la transmission se fait par la pratique : la parole enseigne l’exemple entraine ». Michel Bras a appris, selon lui, la cuisine du rien du tout, et c’est une philosophie de vie pour lui : le plaisir de la cuisine n’est pas lié au luxe des produits mais aux odeurs et aux goûts, aux souvenirs qu’elle construit…

Je suis ressortie de ce colloque avec l’envie de faire la cuisine avec les enfants… Et vous, comment voyez vous la transmission culinaire ?

Source : Etude Ifop-Lesieur pour l’OCPop – Les français et la transmission culinaire