Une huile qui fait débat

16 mars 2014 4 commentaires Par Ghislaine

Je travaille beaucoup en ce moment sur une huile particulière, l’huile de palme. J’avais beaucoup d’a priori sur cette huile : riche en saturés, cause de déforestation… Et pourtant, en quelques mois j’ai appris à la connaître et même, à la défendre… Car je n’aime pas les boucs émissaires !

Une huile riche en acides gras saturés

L’huile de palme contient environ 50% d’acides gras saturés. Ce n’est pas l’huile la plus riche en saturés : l’huile de coprah, par exemple, en contient plus de 85%¹. Pour rappel, les matières grasses doivent représenter entre 35 et 40% des apports énergétiques totaux. Leurs constituants principaux s’appellent des acides gras, qui peuvent être classés en 3 familles :

  • les acides gras saturés : ils sont très stables, ne s’oxydent pas et sont très rigides. La quantité raisonnable : moins de 12% des apports énergétiques totaux.
  • les acides gras mono-insaturés : ils sont assez stables, ce sont les oméga 9. La quantité raisonnable : 15 à 20% des apports énergétiques totaux. Lorsqu’ils proviennent d’une hydrogénation partielle, ces acides gras sont appelés trans. Leur consommation, même en faible quantité, est mauvaise pour la santé.
  • les acides gras poly-insaturés : ils regroupent les familles des oméga 3 et des oméga 6, dits « essentiels » car l’organisme ne sait pas les fabriquer. La quantité raisonnable : 10 à 15% des apports énergétiques totaux.

L’huile de palme, de par sa teneur en acides gras saturés, est onctueuse à température ambiante : cela permet de fabriquer des pâtes feuilletées, des pâtes à tartiner comme le Nutella, des biscuits qui ne rancissent pas dans le placard….

Des produits qui doivent être mangés raisonnablement

Un ingrédient ne saurait résumer l’intérêt nutritionnel d’un aliment : autrement dit, ce n’est pas la présence d’huile de palme qui va dire, ou non, si la pâte à tartiner, si le croissant, si le biscuit sont bons. N’importe qui SAIT que ces produits ne doivent pas être consommés tous les jours, qu’ils soient au beurre, à l’huile de colza ou à l’huile de palme.

La meilleur façon de manger ces produits, c’est de s’en faire une fête : quoi de meilleur qu’une crêpe au Nutella, ou qu’un petit croissant dans son café… Quand il arrive le dimanche ou par surprise un jour ordinaire !

Huile de palme et environnement, le vrai problème

La question de la production de l’huile de palme, en revanche, est une préoccupation réelle pour l’environnement. Pour la plupart des consommateurs, tout a commencé avec ce petit film de Greenpeace (âmes sensibles s’abstenir) :

Un détournement de la pub Kitkat qui passait à l’époque « une pause, un kitkat », et une mise en scène bien gore d’un employé de bureau qui dévore des… doigts d’orangs-outans.

En effet, l’augmentation de la demande mondiale pour l’huile de palme (qui vient d’ailleurs du fait que cette huile permet de remplacer les huiles hydrogénées, très mauvaises pour la santé), a eu pour conséquence une destruction massive des forêts vierges et de ce qu’on appelle les « zones à hautes valeurs en carbone » ou « à hautes valeurs de conservation », comprenez les habitats d’espèces menacées, qu’elles soient végétales ou animales.

En Europe, nous n’avons plus de telles zones : les champs de colza, de pommes de terre et de maïs les ont depuis longtemps recouvertes. En Europe, nous essayons tant que faire se peut de retrouver des zones fleuries au sein de ces espaces, pour sauvegarder les espèces butineuses.

Mais là-bas, en Indonésie et en Malaisie, en Afrique et en Amérique du Sud, il y a encore des forêts vierges, et leur sauvegarde nous permettra, outre de protéger les espèces menacées, de conserver également des centaines, voire des milliers d’espèces non encore découvertes. Pourquoi c’est important ? Parce qu’elles  participent à l’équilibre de notre planète, constituent un réservoir de nouvelles molécules pour la médecine… Bref, elles sont précieuses à court, moyen et long terme.

Une production durable est-elle possible ?

Cela fait maintenant plus d’un an que je travaille sur ce sujet. Et si la définition de la durabilité fait débat, c’est parce que justement beaucoup de choses sont possibles. Le premier standard existant, le plus répandu, est celui de la RSPO. Cet organisme a permis de définir des « principes et critères » et différents niveaux de certification que les entreprises peuvent utiliser pour acheter l’huile de palme.

Ces différents niveaux sont de plus en plus exigeants notamment concernant la traçabilité de l’huile de palme : le fait que les industriels utilisent physiquement bien l’huile de palme produite de façon durable. En effet, ces différents niveaux sont² :

  • Green certificate / Book and Claim : ces certificats permettent aux acheteurs d’huile de palme non durable de financer les actions de la RSPO en faveur de l’huile de palme durable. Ils ne permettent pas aux entreprises d’être certifiées elles-mêmes ni de communiquer sur leurs produits, mais c’est un premier pas.
  • Mass Balance : ces certificats garantissent la durabilité d’un certain volume d’huile de palme, mais physiquement elle est mélangée à de l’huile de palme non durable pour le transport.
  • Segregated : l’huile de palme certifiée « ségrégée » garantit que l’huile de palme utilisée est bien produite de façon durable, mais on ne peut pas encore la tracer
  • Preserved Indentity : l’huile de palme provient d’une plantation identifiée, certifiée durable.

D’autres ONG proposent des certifications. Vous avez peut-être entendu parler de celle de Rainforest Alliance, qui est plus exigeante sur l’impact environnemental avec notamment une définition plus stricte des zones à protéger.

Des entreprises agro-alimentaires françaises se sont mobilisées pour utiliser une huile de palme 100% certifiée RSPO d’ici 2015, et 100% durable (utilisant le plus haut niveau de certification disponible) d’ici 2020. Vous trouverez une mine d’information sur leur site : Alliance Française pour une Huile de Palme Durable.

Et pour finir, une petite vidéo de Rainforest Alliance sur ce thème, à regarder jusqu’à la fin !

Sources :

¹Wikipédia, huile de coco

²Les différents niveaux de certification de l’huile de palme durable par la RSPO, en anglais

 

4 Commentaires

  1. symetrie dit :
    Le 24 mars 2014 - 23:51

    C’est comme tout, tant qu’on mange de manière diversifiée, qu’on n’abuse pas de tels aliments surtout lorsqu’il s’agit de lipides, ca passe. Les médias se font un malin plaisir à jouer sur les peurs.. Ils ne sont jamais dans la demi mesure. D’un coup, l’huile de palme est devenu le mal absolu, un poison à en croire.. idem pour le gluten.
    Il faut créer le buzz coute que coute.. il faut etre radical dans ses affirmations pour pouvoir apres contredire en mettant un bémol. D’ailleurs concernant les acides gras saturés, on commence à voir fleurir de nouvelles infos comme quoi ils seraient finalement bons pour la santé. bref, gardons notre esprit critique 🙂

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  2. Ghislaine dit :
    Le 26 mars 2014 - 11:44

    Complètement d’accord 😀 !

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  3. Shadia dit :
    Le 27 juin 2014 - 13:07

    J’ai appris de nouvelles choses en lisant votre article. Merci beaucoup.

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    • Ghislaine dit :
      Le 27 juin 2014 - 15:22

      Merci, c’est un plaisir de lire ce commentaire 🙂

      Répondre

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